Derrière le traitement réservé à certains de nos aînés, l’affaire Orpea illustre les nombreuses difficultés rencontrées par les professionnels du secteur de la dépendance, aides-soignants en tête. Explications.

Dans un livre-enquête à charge*, Victor Castanet pointe les « pratiques douteuses » d’Orpea, un grand groupe français spécialisé dans les structures de soins et d’hébergement pour personnes âgées. Parmi d’autres accusations, son auteur dénonce un « système de réduction des coûts » qui se solderait par des « mauvais traitements » infligés aux patients et aux résidents, au grand dam des personnels de ces établissements, à la fois débordés et sous-équipés. Lourdes de conséquences, ces allégations devront être confirmées. Plusieurs enquêtes indépendantes, dont celles de l’IGAS et de l’IGF, ont été diligentées pour vérifier et qualifier les faits énoncés.
Face à l’ampleur du scandale présumé, les candidats à l’élection présidentielle se sont immédiatement emparés du sujet, rivalisant de propositions plus ou moins réalistes pour remédier à cette situation. Un constat fait néanmoins l’unanimité. Promise à deux reprises durant le quinquennat, la loi sur le « grand âge » devra être la priorité du suivant.

Un mal plus profond

Derrière le sort réservé à certains de nos aînés, cette affaire témoigne des difficultés rencontrées par les soignants du secteur de la dépendance. Faute de temps et de moyens, nombre d’entre eux s’estiment condamnés à « maltraiter » les personnes âgées.
A plus large échelle, elle révèle les failles d’une branche peu attractive, en proie à de sérieuses difficultés de recrutement, dont les aides-soignants sont les premières victimes.
Les différentes organisations professionnelles le répètent à l’envi : le manque d’effectif nuit à la qualité du service rendu, au détriment des patients. Il se traduit aussi par une charge de travail accrue, rythmée par des cadences infernales confinant à l’épuisement professionnel. Physique et psychique, cette souffrance est accentuée par un manque de reconnaissance généralisé. Elle est amplifiée par le peu de considération portée à la profession, y compris sur le plan salarial.

Des propositions concrètes

De ce point de vue, le Ségur de la santé n’a pas suffi. Fixée à 183 euros nets par mois, la hausse des salaires est jugée « modeste » par les principaux représentants du secteur. Considérée comme un facteur d’attractivité majeur, leur rémunération devra être significativement réévaluée, comme le suggère la Fédération nationale des associations d’aides-soignants, qui réclame également des campagnes d’information thématiques sur le métier… et son utilité sociale. Autre évolution indispensable : la problématique des ressources humaines devra être rapidement tranchée. Pour compenser les besoins existants, l’Association des directeurs au service des personnes âgées revendique la création effective de deux postes supplémentaires par établissement… d’ici à la fin du quinquennat. Appuyée par une nouvelle campagne de formation, cette mesure permettrait de recruter près de 40 000 aides-soignants.

(*) Les Fossoyeurs, éditions Fayard, 388 pages.