La mobilisation des étudiants de la filière en cas d’urgence sanitaire ou d’afflux massif de patients a été rigoureusement encadrée par le législateur.

Certaines précautions ont notamment été prises pour garantir la continuité des apprentissages et des stages, mais aussi leurs conditions d’exercice dans un contexte de crise. Selon les principales organisations syndicales*, le texte représente « une avancée significative dans la considération et la reconnaissance de l’engagement des étudiants et étudiantes mobilisés, et leur garantit un meilleur accompagnement tenant compte de leur santé et des spécificités de leurs formations ». Elles réaffirment néanmoins leur vigilance quant à la mise en œuvre effective de ce dispositif, redoutant notamment « une banalisation ou une systématisation du recours aux étudiants pour compenser les lacunes d’un système de santé en difficulté ».

Outre la prévention des ruptures dans l’enseignement, la préservation de la santé mentale et physique des étudiants fera l’objet d’une attention particulière.

(*) FAGE, ANEMF, ANEPF, ANESF, FNEK, FNESI, FNSIP-BM, ISNAR-IMG, UNECD.

A l’issue des dernières Journées d’étude de l’ANdEP, Florence Girard détaille les grands enjeux en matière de recherche, notamment sur le plan pédagogique et managérial. Elle dévoile également ses attentes pour le prochain quinquennat.

Les dernières Journées d’étude de l’ANdEP se sont tenues le mois dernier. Quels sont les faits à retenir ?

Ces rencontres ont été marquées par le retour des interactions physiques. Les quatre-vingts participants ont pris plaisir à échanger, parfois de manière animée, mais toujours avec bienveillance. La richesse des débats et la qualité des intervenants ont été unanimement soulignées. La thématique choisie y est sans doute pour beaucoup. Sujet hautement stratégique, la recherche a été le fil conducteur de ces deux journées. Comme un symbole, nous avons délivré notre quatrième bourse doctorale en trois ans.

Quels sont les principaux enjeux en matière de recherche ?

La recherche est un facteur d’émancipation et de leadership pour les directeurs d’institut et les équipes enseignantes, mais aussi pour les étudiants. Il nous faut inventer et promouvoir de nouvelles stratégies managériales et pédagogiques visant à mieux intégrer cette dimension dans les formations paramédicales. La recherche est un objet transversal par essence. Elle ne concerne pas uniquement les instituts de formation, comme le rappelle le dernier rapport de l’ANdEP*.

Quels sont les grands enseignements de ce nouveau rapport ?

Nous avons identifié deux « objets frontières » entre les instituts de formation et les terrains de stage : la simulation en santé et la recherche. Ce seront deux leviers critiques pour améliorer la qualité de l’enseignement délivré, accroître le nombre de places disponibles dans les structures de soins et optimiser les pratiques professionnelles. Nous devrons développer ces usages, croiser les expériences et imaginer de nouveaux partenariats. Nous devrons par ailleurs élargir le champ de notre réflexion à la notion de tutorat, à la fois peu reconnue et mal valorisée. D’autres freins devront naturellement être levés.

Florence Girard lors de « Journées de l’ANDEP » en mars 2022

Lesquels ?

La composition des équipes de formation devra évoluer en conséquence. Nous aurons notamment besoin d’enseignants-chercheurs pour favoriser cette transition. Actuellement en discussion, la création d’un statut de bi-appartenant devra être rapidement concrétisée. Axée sur la recherche et la clinique, cette double valence permettra de bâtir des ponts entre les instituts et le terrain. Une chose est sûre : nous devrons mieux appréhender le profil sociologique des étudiants.

C’est-à-dire ?

Nous devrons repenser nos maquettes de formation en fonction des aspirations de la jeune génération. Les difficultés rencontrées dans les structures de soins, notamment en matière de recrutement et de fidélisation, ne relèvent pas de notre responsabilité. Elles nous invitent néanmoins à la réflexion. Nous tâcherons de mieux accompagner les étudiants dans la construction de leur projet professionnel. La qualité du suivi pédagogique et l’accueil en stage seront deux paramètres déterminants.

La recherche peut-elle être un trait-d’union en la matière ?

Absolument ! Cette discipline trace de nouvelles perspectives pour les directeurs, les formateurs et les étudiants, mais aussi pour le système de santé. La recherche sera un véritable trait d’union entre la formation et la profession, en particulier dans sa dimension pédagogique et clinique. Elle aura un impact certain sur la profondeur de l’enseignement, non sans améliorer les pratiques professionnelles. A tout le moins, elle enrichira la réflexion sur les activités de soins. Ce nivellement par le haut pourrait également contribuer à fidéliser les soignants.

Quelles sont vos principales attentes pour le prochain quinquennat ?

La révision du référentiel de formation des infirmiers, qui doit intervenir au second semestre, sera une priorité majeure. Parmi d’autres impératifs, les textes devront mieux prendre en compte les enjeux de santé publique présents… et futurs ! La DGOS ne devra pas se contenter d’un simple toilettage. La recherche, l’interdisciplinarité et les usages numériques devront notamment être pensés dès les premiers stades de l’apprentissage. Dans le prolongement de cette réforme, le processus d’universitarisation des professions paramédicales devra être mené à son terme.

Quid du nouveau partenariat entre l’Etat et Régions de France ?

Nous suivrons attentivement la déclinaison opérationnelle de ce protocole prometteur. Nous devrons impérativement bénéficier d’un soutien logistique et financier pour accompagner la hausse de nos capacités d’accueil et la nécessaire augmentation des terrains de stage, qui reste aujourd’hui notre principal motif de préoccupation. Ce partenariat renouvelé devra également permettre de consolider la procédure Parcoursup. Longue et complexe, elle doit être simplifiée pour alléger la charge administrative qui pèse sur les directeurs d’institut et leurs équipes.

(*) « Etude de la qualité des formations paramédicales depuis le lancement du processus d’universitarisation », ANdEP (mars 2022).

Certains tracent déjà les grandes lignes du futur quinquennat. Créés en septembre dernier, les libéraux de santé ont élaboré leur propre projet de loi.

Comportant neuf chapitres et soixante-douze articles, ce texte a été officiellement présenté fin mars, en marge de l’élection présidentielle et des élections législatives, avec l’ambition clairement affichée de nourrir le débat politique. Derrière ce coup de communication, les onze membres de cette intersyndicale – majoritairement composée de professions paramédicales – proposent des mesures concrètes pour moderniser l’accès aux soins de proximité.

La philosophie générale repose sur un principe fondateur qui consacre la ville comme le premier niveau de prise en charge pour les besoins non vitaux. Dans les grandes lignes, les libéraux de santé misent notamment sur la coopération interprofessionnelle et la transformation des métiers pour bâtir une offre plus lisible et une organisation plus fluide, où le patient deviendrait acteur de son parcours de santé. Ils plaident également pour une dynamique conventionnelle plus équilibrée et plus participative, notamment sur la définition et la gestion de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie. Ils réclament par ailleurs un fléchage plus clair et plus juste des financements publics vers le secteur ambulatoire.

NB : Les libéraux de santé regroupent des organisations représentatives des médecins (CSMF et SML), des infirmiers (FNI), des chirurgiens-dentistes (CDF), des masseurs-kinésithérapeutes (FFMKR), des pharmaciens (FSPF), des orthophonistes (FNO), des podologues (FNP), des audioprothésistes (SDA), des biologistes médicaux (SDB) et des orthoptistes (SNAO).

Missionné en juin dernier par Olivier Véran, le Pr Franck Chauvin a identifié dix chantiers pour « dessiner la santé publique de demain ».

Parmi les quarante propositions formulées par le président du HCSP, la mise en œuvre d’un plan quinquennal visant à améliorer la littératie en santé est jugée « prioritaire ». Selon lui, il devra concerner tous les Français… dès le plus jeune âge. L’école primaire est d’ailleurs considérée comme une période idoine pour favoriser cet apprentissage, en lien étroit avec les familles.

Plus largement, il fixe trois grands objectifs à court et moyen terme : augmenter l’espérance de vie en bonne santé, réduire les inégalités sanitaires et préparer le système de soins aux enjeux contemporains. Une ambition forte qui nécessitera notamment de placer la prévention au cœur des politiques publiques.

A savoir : deux rapports complémentaires, l’un sur la culture de la promotion de la santé chez les jeunes et l’autre sur la diffusion de l’information auprès des professionnels en temps de crise, ont été simultanément présentés début mars, lors d’un événement commémorant les vingt ans de la loi Kouchner.

Une fois n’est pas coutume, le Collège de la HAS prend une position politique tranchée sur un sujet sensible, loin de ses habituelles recommandations scientifiques ou de bonnes pratiques.

Dans une lettre ouverte publiée fin mars, ses membres sonnent la mobilisation générale pour redynamiser « un système de santé à bout de souffle ». Exemples chiffrés à l’appui, ils détaillent les impacts du manque de soignants. Ils pointent également des difficultés systémiques, exacerbées par la pandémie, qui sont autant de pertes de chance pour les patients, à commencer par le manque de coordination entre la ville, l’hôpital et le médico-social. Le diagnostic est sans appel : « La qualité des soins et des accompagnements est très largement insuffisante ! »

Au-delà du constat, les sages de la HAS formulent des propositions concrètes pour améliorer l’organisation, le financement et l’accès aux soins. Parmi d’autres solutions, ils préconisent notamment un élargissement des compétences paramédicales et une reconnaissance des nouveaux rôles, dont celui d’infirmier de pratique avancée. Plus largement, la prévention et la prise en compte de l’expérience patient sont également présentés comme des voies de progrès majeures.

Dans le prolongement des engagements pris lors du Ségur de la santé et de France Relance, la mise à jour du protocole signé par l’Etat et Régions de France doit finalement permettre de créer 13 587 places supplémentaires par an dans les instituts de formations sanitaires et sociales, à compter de la rentrée 2023.

Premiers concernés, les instituts de formation en soins infirmiers devront s’adapter. Outre un renforcement significatif de leurs capacités d’accueil, ils seront également confrontés à la problématique des terrains de stage, déjà en nombre très insuffisant.

Ils bénéficieront néanmoins d’un soutien « financier et logistique » pour accompagner cette transition et promouvoir l’innovation pédagogique, en particulier sur le plan technologique. Parmi d’autres déclinaisons, ce partenariat renouvelé devra notamment permettre de « consolider » la procédure Parcoursup.

Un comité de suivi sera chargé de la mise en œuvre opérationnelle du protocole, mais aussi d’établir un bilan annuel de la réforme. Il sera placé sous l’égide du ministère des Solidarités et de la Santé et de Régions de France.

NB : 5 870 nouvelles places seront créées dans les IFSI, 5 763 dans les IFAS et 1 954 pour les AES.

Attendue en février, la campagne de communication centrée sur les métiers du soin et de l’accompagnement a finalement été lancée mi-mars.

Focalisée sur quatre métiers – infirmier, aide-soignant, éducateur spécialisé et accompagnant éducatif et social – elle s’achèvera en septembre prochain. Présentée comme une action de politique publique, cette opération promotionnelle s’adresse principalement aux jeunes générations et aux personnes en reconversion. Pilotée par le ministère des Solidarités et de la Santé et le Secrétariat d’Etat aux personnes handicapées, ce dispositif doit permettre de « susciter des vocations ».

En marge de cette campagne, le gouvernement dit également vouloir miser sur l’apprentissage et la validation des acquis et de l’expérience pour pallier les difficultés de recrutement observées dans les établissements sanitaires et médico-sociaux. Parmi d’autres objectifs, 10 000 apprentis sont attendus dans les secteurs public et privé… dès cette année.

A l’initiative de l’Association des maires ruraux de France, un collectif composé de soignants, d’élus locaux et d’usagers formule quatre propositions concrètes pour améliorer durablement l’accès aux soins dans les zones médicalement sous-dotées.

L’heure est à l’urgence ! Trente-cinq organisations viennent de formuler plusieurs propositions « concrètes, réalisables et consensuelles » à l’attention des candidats à l’élection présidentielle et aux élections législatives. Installé en juin dernier, à l’initiative de l’Association des maires ruraux de France, un collectif regroupant des soignants, des élus locaux et des usagers s’est lancé dans une réflexion prospective pour améliorer durablement l’accès aux soins dans les zones médicalement sous-dotées. « Le souci de l’intérêt général a permis de réunir, d’abord, et de faire émerger, ensuite, une démarche collective en faveur des habitants des territoires ruraux », affirme Dominique Dhumeaux, premier vice-président de l’AMRF. Une expérience inédite au regard de la pluralité des parties représentées, comme l’ont souligné les signataires. A l’inverse du Ségur de la santé, la plupart des organisations paramédicales ont été associées aux processus de concertation et de décision.

Quatre mesures disruptives

A l’unisson, les membres du collectif sur l’accès aux soins ont identifié quatre mesures disruptives. Ils souhaitent notamment favoriser la diversification des lieux de stage, hors du lieu de formation initiale, quitte à rendre cette pratique obligatoire. Une évolution radicale qui s’appuiera sur le développement de la maîtrise de stage universitaire, des hébergements territoriaux des étudiants en santé et des aides au transport. Ils plaident également pour la généralisation des équipes de soins coordonnées autour du patient. Un retour à la proximité qui permettrait de replacer l’individu au centre de la prise en charge, mais aussi de limiter les passages inutiles aux urgences en privilégiant le recours à la télé-expertise. Ils réclament par ailleurs la création d’un guichet unique pour faciliter l’installation des professionnels, notamment sur le plan administratif et financier. Autre proposition clef : les signataires veulent promouvoir l’exercice mixte pour renforcer les coopérations entre la ville et l’hôpital.

Une réforme soumise à conditions

Ambitieuses et constructives, ces pistes de réforme sont néanmoins soumises à conditions. Outre l’appui du pouvoir politique, elles nécessiteront une meilleure valorisation du travail de coordination, notamment dans le cadre des ESCAP. Un mode de collaboration qui suscite un enthousiasme modéré de la part de l’assurance maladie. Parmi d’autres impératifs, leur traduction opérationnelle exigera une mobilisation totale des différents acteurs locaux et un meilleur partage des compétences, en particulier dans les territoires les plus reculés. Fragilisée voire annihilée par les querelles de chapelle, la dynamique interprofessionnelle devra se construire dans le temps, dans la transparence et dans la confiance. De toute évidence, les professions paramédicales devront jouer un rôle clef dans la restructuration de l’offre territoriale de santé. Jugées prioritaires, les quatre propositions du collectif accès aux soins ne seront pas suffisantes pour inverser la tendance à l’œuvre. « Nous ferons bientôt de nouvelles suggestions pour nourrir le débat public », prévient Dominique Dhumeaux. Dans l’immédiat, elles seront présentées aux principaux candidats, à l’occasion d’une réunion programmée à la fin du mois.

NB : les trente-cinq signataires représentent des patients, des citoyens sans médecins, des infirmiers, des urgentistes hospitaliers, des médecins, des organisations interprofessionnelles, des ambulanciers, des pompiers, des internes, des médecins hospitaliers, des masseurs-kinésithérapeutes, des étudiants en médecine, des hôpitaux de proximité, des centres de santé, des pharmaciens, des chirurgiens-dentistes, des sage-femmes, des biologistes, des orthophonistes, des mutuelles et des élus.  

Dans le cadre de son projet social 2021-2024, l’AP-HP lance un plan de recrutement sans précédent.

Présenté début février, il comporte onze mesures concrètes visant à restaurer l’attractivité des professions paramédicales et à combler rapidement les besoins observés, notamment en matière d’infirmiers*. Parmi d’autres ambitions, l’assistance publique souhaite limiter le recours à l’intérim, en généralisant les CDD et en multipliant les embauches. Elle prévoit plus particulièrement d’offrir des contrats de six ou neuf mois à 300 intérimaires, mais aussi de recruter 800 jeunes diplômés dès la rentrée 2022.

Pour attirer et fidéliser les étudiants de troisième année, 1 200 stages de préprofessionnalisation seront déployés. Ils se verront proposer un contrat d’allocation d’études de 7 500 euros… contre un engagement de dix-huit mois.

Outre une prime d’installation et des aides au logement, plusieurs dispositifs incitatifs ont par ailleurs été initiés pour mieux rémunérer les heures supplémentaires, accompagner les prises de poste, améliorer la qualité de vie au travail et stimuler l’évolution des carrières.

(*) 1 400 postes d’infirmiers sont actuellement vacants au sein de l’AP-HP. Un chiffre significatif qui correspond à 7,5 % de ses effectifs.