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Dédiée aux métiers du grand âge et de l’autonomie, une convention d’engagement de développement des emplois et des compétences a été signée fin octobre par deux ministres*, cinq organisations d’employeurs et quatre organisations syndicales de cinq branches professionnelles.

Ce nouvel accord-cadre national doit permettre de restaurer l’attractivité d’un secteur sinistré, en facilitant notamment les mobilités professionnelles, les passerelles intersectorielles et les évolutions de carrière. Il doit également contribuer à résoudre des problématiques structurelles en matière de recrutement ou de fidélisation des professionnels. Des actions de promotion seront par ailleurs initiées pour attirer de nouveaux profils et séduire la jeune génération. Parmi d’autres, les infirmiers, les aides-soignants et les auxiliaires de vie font naturellement partie du périmètre des métiers ciblés par cet EDEC, dont le budget est estimé à 2,4 milliards d’euros. Il sera financé pour moitié par le ministère du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion… et prendra fin en décembre 2023. Pour rappel, une première convention d’engagement de développement des emplois et des compétences dans le domaine de l’autonomie avait été signée en 2014.

(*) Elisabeth Borne, ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion, et Brigitte Bourguignon, ministre déléguée à l’Autonomie.

Pour pallier les difficultés de recrutement, le gouvernement joue la carte de la séduction auprès de la jeune génération, sans pour autant négliger les professionnels en exercice.

Dans le cadre d’une campagne de communication numérique visant à promouvoir les métiers du grand âge, quatre grands objectifs étaient poursuivis : changer l’image associée à ces métiers pour faire face à l’urgence des besoins en recrutement et aux enjeux de long terme du secteur ; agir en faveur du développement des formations professionnelles ; améliorer la qualité de vie au travail et lutter contre la sinistralité ; assurer de meilleures conditions d’emploi et de rémunération aux professionnels du grand âge.

Tout au long du mois de septembre, des messages incitatifs ont été diffusés sur les réseaux sociaux pour convaincre les 15-24 ans de choisir cette filière. Qualifiés ou en reconversion, les demandeurs d’emploi de 25 à 49 ans étaient également ciblés. Pour répondre au défi du vieillissement de la population, 350 000 postes devront être pourvus d’ici à 2025, principalement dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, les maisons de retraite et les structures d’aide à domicile.

59 mesures pour un montant total de quatre milliards d’euros sur cinq ans. Officiellement présenté le 29 octobre dernier, le rapport El Khomri* contient de nombreuses propositions pour restaurer l’attractivité des métiers du grand âge et de l’autonomie.

Cinq axes forts ont été identifiés : assurer de meilleures conditions d’emploi et de rémunération, en ouvrant de nouveaux postes, en rénovant les conventions collectives et en mettant en place une initiative nationale ; réduire la sinistralité et améliorer la qualité de vie au travail ; moderniser les formations et changer l’image des métiers ; innover pour transformer les organisations ; garantir la mobilisation et la coordination des acteurs et des financements aux niveaux national et territorial.
L’heure est visiblement à l’urgence. Mal préparée, la France n’est pas encore prête pour affronter une crise démographique sans précédent. « Nous sommes confrontés à un immense défi. Il nous faudra répondre au vieillissement de la population, mais aussi à la volonté des Français de rester chez eux le plus longtemps possible », rappelait très justement l’ex-ministre du Travail de François Hollande, aujourd’hui directrice de S2H Consulting (groupe Siaci Saint-Honoré).

92 300 postes à créer

Mieux rémunérer pour mieux recruter : tel sera l’un des principaux enjeux. Augmentation des salaires, remboursement des frais de déplacement, octroi de véhicules de fonction… Myriam El Khomri identifie plusieurs pistes pour améliorer la « santé financière » des soignants, en particulier dans le secteur de l’aide à domicile, via une modification des conventions collectives. Significatif, le coût de la remise à niveau des rémunérations inférieures au Smic est estimé à 850 millions d’euros sur la période 2020-2024.
Pour faire face à la hausse programmée des besoins liés à la prise en charge des personnes en perte d’autonomie, 92 300 postes d’aides-soignants et d’accompagnants éducatif et social seront également créés au cours des cinq prochaines années, soit un investissement total de 2,25 milliards d’euros.
Près de 500 millions d’euros seront par ailleurs consacrés à la création de plates-formes départementales des métiers du grand âge, une sorte de « guichet unique » visant notamment à sécuriser les recrutements à l’échelle locale.

Vers une suppression du concours d’aide-soignant ?

Pour absorber la demande actuelle et future, Myriam El Khomri suggère de doubler le flux de formation annuel, alors que les candidatures ont chuté de 25 % en cinq ans. Elle recommande notamment la suppression du concours d’aide-soignant, qu’elle considère comme « un frein d’accès à la profession », mais aussi la gratuité de la formation, qui pourrait désormais être accessible via ParcourSup. La question du « manque à gagner » pour les instituts spécialisés est ouvertement posée.
Elle préconise par ailleurs de recourir davantage à l’alternance et à la validation des acquis de l’expérience, et propose que les soignants au contact des personnes âgées et dépendantes suivent une formation spécifique en gérontologie.
Qu’il s’agisse des aides-soignants ou des accompagnants éducatif et social, 352 600 professionnels devront être formés d’ici à 2024. Pour mémoire, 60 000 postes sont actuellement vacants. 200 000 autres sont également menacés par les départs en retraite et le turn-over…

Des mesures complémentaires

D’autres chantiers d’envergure seront parallèlement engagés, à commencer par un programme de lutte contre la sinistralité, trois fois supérieure à la moyenne nationale dans ces deux professions. Financée par les excédents de la branche accidents du travail et maladies professionnelles, cette action devra contribuer à réduire la proportion actuelle de 25 %. Un montant de 500 millions est prévu à cet effet, avec un renforcement de la logique préventive.
Pour finir, une campagne de communication sur les métiers du grand âge sera prochainement lancée. Dotée d’un budget de 20 millions d’euros, elle devra changer le regard de la société sur des métiers socialement utiles, mais insuffisamment reconnus.
Selon Agnès Buzyn, les propositions du rapport El Khomri constitue « une feuille de route à la fois courageuse, innovante et opérationnelle ». La plupart d’entre elles pourraient d’ailleurs être reprises dans le projet de loi consacré au grand âge, qui devrait être présenté en décembre prochain.

(*) « Plan de mobilisation générale en faveur des métiers du grand âge pour la période 2020-2024 », Myriam El Khomri (octobre 2019).

NB : Suppression du concours d’aide-soignant dès la rentrée 2020, réingénierie de la formation en blocs de compétences, certification de la formation d’assistant en soins de gérontologie, création d’une formation spécifique liée au grand âge… Partie prenante du groupe de travail constitué par le ministère de la Santé, l’ANdEP a étroitement participé à l’élaboration de ces recommandations. Notons également que l’intégration des candidats à la formation d’aide-soignant dans le dispositif ParcourSup n’est pas encore actée. Elle est même peu probable pour la rentrée prochaine.