Profonde et durable, la crise sanitaire a lourdement perturbé le fonctionnement instituts de formation paramédicale… et la vie de leurs étudiants. Retour sur les événements marquants de cette année riche d’enseignements pour l’avenir.

La pandémie a bouleversé les codes de l’apprentissage. Tout au long de l’année, les instituts de formation paramédicale ont été contraints de composer avec l’incertitude, au gré de la dynamique épidémique. Condamnés à innover, ils ont dû adapter leurs méthodes pédagogiques. Face à des orientations contradictoires et confusantes, directeurs, formateurs et personnels administratifs ont su faire preuve d’une réactivité exceptionnelle et d’une capacité d’adaptation remarquable. Malgré les nombreuses difficultés rencontrées, le bilan demeure globalement satisfaisant. Durant cette période troublée, la maîtrise progressive des usages numériques a permis d’assurer l’essentiel, à savoir maintenir le lien avec les étudiants, dont la santé mentale s’est considérablement dégradée au cours des derniers mois. Longtemps privés de cours, de ressources et de vie sociale, ils ont connu des heures particulièrement sombres lors des périodes de confinement. En pleine détresse psychologique et matérielle, ils ont très mal vécu l’isolement et la précarité. Régulièrement mobilisés dans le cadre de l’urgence sanitaire, la plupart d’entre eux ont vu leur formation impactée, non sans accroître leur crainte de l’avenir. Parfois négligée, la qualité de vie des étudiants doit être considérée comme une priorité absolue.

Des évolutions majeures

Dans le marasme ambiant, plusieurs avancées majeures ont été entérinées cette année. Six ans après son lancement, le processus de réingénierie du diplôme des aides-soignants et des auxiliaires de puériculture a finalement abouti fin mai. Cette formation sera désormais construite autour de domaines d’activité et de blocs de compétences, encadrés par des référentiels thématiques. Etalée sur douze mois, elle comportera 22 semaines de théorie et 22 semaines de pratique, dont trois stages de cinq semaines et un stage de sept semaines en fin de parcours. Autre bouleversement notable : les masseurs-kinésithérapeutes se verront dorénavant reconnaître le grade de master à l’issue de leur cursus. Attendue et réclamée par la profession depuis six ans, cette reconnaissance institutionnelle a été avalisée en juin dernier par Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé. La promotion 2017-2021 sera la première à en bénéficier. Au-delà du symbole, ce statut devrait notamment faciliter la poursuite des études au niveau doctoral, mais aussi la mobilité internationale. Seule ombre tableau : le sort réservé aux étudiants diplômés depuis 2015, date de la dernière grande réforme des études de masso-kinésithérapie, n’a pas été tranché. A plus large échelle, l’appétence des aspirants pour le monde paramédical n’a pas été remise en cause par la pandémie. Accessibles depuis l’an dernier via ParcourSup, les différents métiers de la filière ont connu un franc succès. Tous choix confondus, la formation en soins infirmiers a été la plus demandée pour la deuxième année consécutive.

Les défis de la rentrée

Toujours aussi incertaine, l’évolution de la situation sanitaire n’offre aucune garantie pour la rentrée prochaine. La perspective d’une nouvelle vague épidémique se profile, malgré l’augmentation annoncée du nombre de personnes vaccinées. La progression éclair du variant delta ne devra pas pour autant mettre en péril certains chantiers prometteurs. La poursuite du processus d’universitarisation des formations paramédicales devra notamment faire l’objet d’une attention particulière, au même titre que la hausse programmée des capacités d’accueil dans les IFSI et les IFAS. Une discussion de fond sur le métier de formateur – et plus largement sur la place de la formation – devra par ailleurs être amorcée avec les pouvoirs publics. De nombreuses questions restent aujourd’hui en suspens, à commencer par la plus importante d’entre elles : comment accueillir plus d’étudiants, tout en leur proposant un encadrement de qualité, dans le contexte pandémique actuel ? Cette réflexion vaut pour l’enseignement théorique, mais aussi pour la pratique des stages… en nombre très insuffisant. Mobilisée depuis le début de la crise, l’ANdEP suivra de près l’avancée de ces travaux stratégiques. Rompue aux exigences de la communication digitale, l’association s’engage à échanger plus régulièrement avec ses adhérents, au-delà de ses traditionnelles journées annuelles. Trois à quatre points d’actualité seront désormais proposés chaque année, contre un seul auparavant.

Dans un rapport d’information présenté début juillet en commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, Cyrille Isaac-Sibille plaide en faveur du renforcement des missions et carrières paramédicales*.

Le député MoDem du Rhône propose trois pistes d’évolution concrètes : l’élargissement des coopérations interprofessionnelles, le développement de l’exercice en pratique avancée et la modification du périmètre de compétences des différents professionnels. Jugeant l’organisation des soins inadaptée aux défis du vieillissement de la population et de la chronicisation de certaines pathologies lourdes, il préconise notamment d’actualiser la liste des actes réalisés par les professions paramédicales.

Il suggère également de renforcer l’exercice en pratique avancée pour les infirmiers, non sans adapter et revaloriser le modèle économique du métier, en particulier dans le secteur libéral. Selon lui, d’autres auxiliaires médicaux devraient également profiter de cette montée en compétences, en tête desquels figurent les techniciens de laboratoire et les manipulateurs en électroradiologie.

(*) « Quelle vision dans 10 ans et comment y parvenir ? », Cyrille Isaac-Sibille (juillet 2021).

La création de la mention « urgences » de la pratique avancée infirmière a reçu un avis négatif du Haut conseil des professions paramédicales.

Tombée fin juin, cette décision suscite le mécontentement des instances professionnelles. L’ONI dénonce notamment le « rétropédalage » du gouvernement qui a « dépourvu le texte initial de sa substance » à la suite de « pressions corporatistes ». Selon son président, l’intervention des infirmiers de pratique avancée aurait permis d’améliorer le fonctionnement des services d’urgence, via la délégation de certaines tâches. Elle aurait également contribué à soulager des personnels totalement débordés.

Encouragée par la Cour des comptes, cette piste d’évolution professionnelle n’a finalement pas été retenue par l’exécutif. Une décision unilatérale qui sonne comme un désaveu pour les IPA, dont le champ d’action a été réduit à la portion congrue. Outre une dévalorisation de la profession, Patrick Chamboredon y voit une menace directe pour l’accès aux soins et la sécurité des patients.

Consultatif, l’avis du HCPP ne condamne pas pour autant la création de cette cinquième mention de la pratique avancée.

Dans un Livre Blanc publié début juillet, la Société française de santé digitale formule dix propositions concrètes pour accompagner la généralisation du télésoin sur le territoire français.

« Ce document aborde les différents volets de cette avancée majeure pour le développement de la santé digitale en France », souligne la SFSD. Parmi d’autres préconisations, les auxiliaires médicaux sont notamment invités à définir un objectif de soin, à respecter les bonnes pratiques, à travailler en équipe pluriprofessionnelle ou à choisir un outil accessible à tous. Il leur est également recommandé d’obtenir le consentement éclairé des patients avec lesquels ils devront construire le parcours alterné, dans le cadre d’une décision partagée. Selon les auteurs de ce Livre Blanc, la formation des acteurs de santé sera un prérequis indispensable pour favoriser l’essor de cette pratique.

Quelles que soient les démarches entreprises, un impératif de taille devra par ailleurs être respecté : garder l’humain au centre de tout. Pour rappel, le télésoin est entré dans le droit commun le 4 juin dernier. Toutes les professions paramédicales sont désormais autorisées à y recourir.

(*) « Le télésoin au cœur de l’innovation des parcours de santé », SFSD (juillet 2021).

La propagation du variant delta contraint l’exécutif à employer les grands moyens.

Pour prévenir l’apparition d’une quatrième vague épidémique, tous les personnels soignants et tous les professionnels au contact des personnes fragiles devront être impérativement vaccinés d’ici au 15 septembre prochain.

A compter de cette date, ils ne pourront plus travailler et ne seront donc plus payés. Directement concernés, les paramédicaux accusent un certain retard en la matière, notamment à l’hôpital. Selon un tableau de bord produit par l’AP-HP auquel Le Monde a eu accès, les infirmiers et les aides-soignants font partie des professions de santé les moins vaccinées. Au 11 juin, 37 % des personnels non médicaux pouvaient justifier d’un cycle vaccinal complet, contre 68 % chez les médecins. Selon le dernier point épidémiologique publié par Santé publique France, les chiffres ne sont guère meilleurs dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes et dans les unités de soins de longue durée, où le taux de couverture vaccinale est estimé à 45 %.

La situation semble toutefois plus favorable en ville. Au 8 juillet, 75 % des professionnels de santé libéraux étaient complètement vaccinés.

Professeur d’anglais à l’IFSI de la Fondation Léonie Chaptal en région parisienne, Michel Lemieux mène actuellement une étude inédite sur l’utilisation de l’anglais dans la pratique infirmière en France et en Europe.

Ce projet doit notamment permettre de mieux cerner les besoins des IDE en la matière. Il doit également permettre de mieux former les futurs élèves infirmiers. Trois minutes vous suffiront pour répondre à une vingtaine de questions. Les résultats complets de cette enquête déclarative seront dévoilés à la fin du mois de septembre.

Pour plus d’informations

 

La publication officielle du nouveau programme de formation des aides-soignants et des auxiliaires de puériculture a fait l’objet d’une matinée d’information, organisée par l’ANdEP. Particulièrement appréciée, l’initiative sera régulièrement reconduite sur d’autres sujets.

La crise sanitaire a bouleversé nos modes de communication, surtout à grande échelle. La visioconférence est le premier marqueur de ce changement. Chacun d’entre nous a dû faire preuve d’agilité en la matière, certains avec plus d’aisance que d’autres, au moins au début. Rompue à cette nouvelle exigence, l’ANdEP veut saisir cette opportunité pour échanger plus fréquemment avec sa base, en dehors des traditionnelles journées annuelles.

En perpétuelle évolution, le devenir de la santé mérite des éclairages plus réguliers. Aussi avons-nous décidé de multiplier les points d’actualité. Trois à quatre rendez-vous seront désormais programmés chaque année, contre un seul auparavant. Bien utilisée, la technologie peut abolir les distances. Elle peut également contribuer à alléger des emplois du temps souvent surchargés. Elle peut surtout nous permettre de mieux nous faire connaître, de populariser nos initiatives et de gagner de nouveaux adhérents, gage d’une représentativité accrue dans nos travaux avec le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation ou le ministère des Solidarités et de la Santé. Double tutelle oblige.

Une implication totale

Depuis quinze mois, les déplacements et les rencontres ont été réduits à la portion congrue, y compris pour les membres du bureau et du conseil d’administration de l’ANdEP. En dépit des contraintes pratiques, logistiques et techniques, notre association n’a jamais levé le pied. Elle a inlassablement poursuivi ses objectifs et ses missions au service des formations en santé. Elle s’est particulièrement impliquée dans les différents groupes de travail pilotés par la DGOS. Entamé, interrompu puis repris, le processus de réingénierie du diplôme des aides-soignants et des auxiliaires de puériculture touche aujourd’hui à sa fin. Il nous est apparu naturel de communiquer sur cette réforme majeure, tout comme il nous paraît évident de faciliter la veille documentaire et d’accompagner les instituts de formation, quelle que soit la filière enseignée. Planifiée depuis deux mois, cette réunion ne pouvait pas mieux tomber.

Comme un symbole, elle s’est finalement tenue le jour de la signature officielle du texte, soit le 28 mai. En guise de soutien à la démarche initiée par l’ANdEP, la DGOS nous avait transmis toute la documentation nécessaire. Preuve de l’engouement pour ce sujet, 80 personnes s’étaient inscrites. Elles étaient plus d’une centaine à se connecter, et vraisemblablement plus à leurs côtés. Petit clin d’œil de l’histoire : le nouveau référentiel de formation fait la part belle à l’enseignement à distance. La pomme n’est pas tombée loin de l’arbre.

Un éclairage exhaustif

3h30 ! C’est le temps qu’il nous aura fallu pour passer en revue le nouveau programme de formation des aides-soignants et des auxiliaires de puériculture. Comme attendu, la formation sera positionnée au niveau 5. Elle sera désormais construite autour de domaines d’activité et de blocs de compétences, encadrés par des référentiels thématiques. 22 semaines de théorie et 22 semaines de pratique. Etalée sur douze mois, la formation sera équilibrée. Il y aura trois stages de cinq semaines et un stage de sept semaines, en fin de cursus. A noter : la feuille de stage, document officiel du dossier scolaire présenté au jury final, a été enrichie. Les absences justifiées seront limitées, la formation pourra être doublée une fois et les présentations devant le jury seront réduites à quatre passages.

A l’instar des études en soins infirmiers, la construction professionnelle fera l’objet d’un accompagnement spécifique. Les périodes de stage chez l’employeur seront planifiées à l’avance. Une exception a toutefois été prévue pour favoriser l’acquisition de compétences dans les situations aiguës. Selon les multiples options du diplôme et la variété des acquis préalables, ces « passerelles » confirment tout l’intérêt d’un parcours individualisé. Elles invitent à organiser l’alternance de la formation initiale en bloc et non en fractionnée pour faciliter leur intégration. ICOGI, SP, SD et SVE… Les instances désignées s’inspireront fortement des instances de formation de niveau 6, détaillées dans l’arrêté du 21 avril 2007. Un pas de plus vers l’excellence.

Par Elisabeth Winsniewski

Le RPPS et Adeli ne feront bientôt plus qu’un. Actuellement expérimenté pour une durée de dix-huit mois, le nouveau répertoire partagé des professionnels de santé sera progressivement élargi aux professionnels des secteurs sanitaire, social et médico-social.

Une évolution qui permettra notamment à toutes les professions paramédicales d’accéder au dossier médical personnel ou aux messageries sécurisées de santé, ce qui n’était pas le cas pour nombre d’entre elles. Les infirmiers seront directement enregistrés par l’ONI… dès le mois de septembre. Pour ceux qui y sont inscrits, la transition sera même automatique.

Pour les autres, ils devront effectuer les formalités nécessaires auprès de l’institution ordinale. La démarche n’est pas anodine pour les membres de la profession. Elle leur permettra notamment d’accéder à différents services numériques, tels que l’application mobile e-CPS. Elle leur permettra également d’obtenir leur carte CPS. Un outil indispensable pour transmettre des feuilles de soins électroniques ou travailler avec des établissements de santé qui ont systématisé son usage.

NB : Dans le cadre d’une procédure anticipée, 35 000 infirmiers ont déjà téléchargé et activé leur application mobile e-CPS.

La mise en place de la section du CNU de sciences de la rééducation n’aura été qu’une première étape. Les masseurs-kinésithérapeutes se verront désormais reconnaître le grade de master à l’issue de leur cursus de formation.

Attendue et réclamée par la profession depuis six ans, cette reconnaissance institutionnelle a finalement été avalisée par Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé. La promotion 2017-2021 sera la première à y accéder. Au-delà du symbole, ce statut devrait notamment faciliter la poursuite des études au niveau doctoral, mais aussi la mobilité internationale. Seule ombre tableau : le sort réservé aux étudiants diplômés depuis 2015, date de la dernière grande réforme des études de masso-kinésithérapie, n’a pas été tranché.

D’autres évolutions professionnelles significatives sont actuellement en réflexion, à commencer par l’autorisation de prescription, le développement de pratiques avancées et l’accès direct aux soins… sans prescription médicale. Trois pistes auxquelles Olivier Véran s’est déclaré favorable.

NB : 120 masseurs-kinésithérapeutes (seulement) ont obtenu un doctorat dans le cadre d’une validation des acquis de l’expérience.