Le drame du CHU de Reims est encore dans tous les esprits*, mais les solutions promises se font toujours attendre.

Annoncé début janvier par le ministère de la Santé et de la Prévention, un plan d’action contre les violences faites aux soignants doit être présenté avant l’été, conformément aux orientations fixées par la Première ministre. Il s’appuiera sur les quarante-quatre mesures issues du rapport Nion/Masseron, remis début juin aux ministres de tutelle. Les deux experts mandatés par la puissance publique ont identifié six objectifs prioritaires : agir sur les déterminants des violences ; acculturer les professionnels ; mieux objectiver les faits de violences internes et externes ; accompagner et soutenir les victimes ; préparer les futurs professionnels ; communiquer auprès de tous les acteurs.

Certaines propositions concrètes, comme le déploiement de dispositifs d’alerte portatifs, la formation initiale et continue des soignants et des personnels d’accueil, le durcissement de la réponse pénale face aux menaces et aux agressions ou encore un meilleur accompagnement des victimes dans leurs démarches judiciaires, ont particulièrement retenu l’attention du gouvernement. Une chose est sûre : la situation devient problématique, en particulier chez les infirmiers. Selon la dernière enquête thématique réalisée par l’ONI, 15% des répondants affirmaient subir des agressions « toutes les semaines ou presque ».

(*) Infirmière au CHU de Reims, Carène Mezino a été assassinée dans l’exercice de ses fonctions, le 22 mai dernier.


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Selon Agnès Firmin-Le Bodo, ministre déléguée à l’Organisation territoriale et aux Professions de santé, le gouvernement va investir 45 millions d’euros pour densifier le maillage des MSP, ouvertement considérées comme un « levier prioritaire » pour améliorer durablement l’accès aux soins dans les territoires.

« Une maison de santé pluriprofessionnelle ouverte, ce sont environ 600 patients de plus vus chaque année », souligne le ministère de la Santé et de la Prévention, dans un communiqué publié mi-juin. Ventilé sur trois ans, cet investissement doit permettre de créer 1 700 MSP supplémentaires d’ici 2027… soit un total de 4 000 dans la France entière*.

Il permettra également de développer de nouveaux outils et de nouvelles formes d’accompagnement des porteurs de projets pour soutenir les acteurs de terrain et changer concrètement la vie des usagers.
Le « Tout MSP » ne sera pas un remède miracle pour autant. ESP, ESCAP, CPTS… Toutes les formes de regroupement devront être privilégiées pour résoudre la crise de la désertification médicale.


(*) Selon la Direction générale de l’offre de soins, 2 251 maisons de santé pluriprofessionnelles étaient répertoriées sur le territoire français en décembre 2022.

Le gouvernement veut pallier le manque d’assistants de régulation médicale, une profession méconnue, mais non moins essentielle dans la prise en charge des urgences vitales.

Lancée début mai, une campagne de recrutement inédite devait permettre de renforcer les moyens humains des Centre 15, confrontés à une hausse croissante de l’activité, qui va encore augmenter avec la généralisation programmée des services d’accès aux soins. Selon François Braun, 3 000 ARM supplémentaires seraient nécessaires pour couvrir les besoins actuels. L’objectif politique est clairement affiché : mieux structurer la permanence des soins ambulatoires pour désengorger les services d’urgence.

Au-delà de cette opération promotionnelle, qui doit notamment renforcer la visibilité du métier et susciter des vocations auprès de la jeune génération, un dispositif temporaire de formation en alternance sera prochainement créé. Annoncée début juin par le ministère de la Santé et de la Prévention, cette mesure prendrait fin en décembre prochain, mais pourrait être prolongée en cas de succès. A tout le moins, près de 700 places supplémentaires seront ouvertes dès la rentrée 2023. Deux nouveaux Cfarm seront également installés en janvier 2024.


Photo : Philippe Chagnon / Cocktail Santé

Les syndicats professionnels et l’Assurance maladie ont signé un dixième avenant à la convention nationale des infirmiers.

Conclu mi-juin, il prévoit des « revalorisations tarifaires importantes » qui doivent notamment contribuer à améliorer la prise en charge des patients à domicile. Outre la généralisation, en octobre prochain, du bilan de soins infirmiers pour les patients de moins de 85 ans, l’indemnité forfaitaire de déplacement sera augmentée de 10 %. Cet accord prévoit également un « accompagnement financier » pour compenser la perte de revenus des infirmiers libéraux suivant la formation d’infirmier en pratique avancée, via la création d’une aide de 15 000 euros*.

Particularité notable : il s’agit du deuxième accord conclu dans le cadre des négociations transversales organisées avec les représentants syndicaux des professions paramédicales conventionnées pour amortir le choc inflationniste qui pèse sur leur activité. Après les orthoptistes et les infirmiers, des mesures « fortes et lisibles » seront prises avant l’été pour les masseurs-kinésithérapeutes et les orthophonistes.

NB : des travaux seront prochainement engagés entre le ministère et les représentants de la profession pour permettre aux infirmiers de concourir à la permanence des soins et déterminer les modalités de prise en charge des soins non programmés après régulation médicale.

(*) Cet accompagnement financier sera de 17 000 euros dans les DROM.


Photo : Philippe Chagnon / Cocktail Santé

Dans un rapport publié mi-mai, la mission IGAS/IGESR propose des outils adaptés et des mesures appropriées pour améliorer la qualité de vie des étudiants en santé, considérée comme « un objectif prioritaire ».

Précarité financière, lutte contre les violences de tous ordres, y compris sexistes et sexuelles, prévention des risques psychosociaux, conditions de travail en stage… Ils formulent vingt-six recommandations concrètes pour assainir leur environnement et mieux prendre en compte leurs principales préoccupations. La formation, la coordination et l’évaluation des encadrants devront notamment faire l’objet d’une attention particulière.

Quatre évolutions sont plébiscitées dans ce domaine : mettre en place des procédures de repérage et d’accompagnement des étudiants en difficulté ; rendre obligatoire une formation à la QVES et au management des étudiants pour les chefs de service, les encadrants et les maîtres de stage ; intégrer le bien être des étudiants de toutes les filières dans tous les objectifs managériaux des encadrants ; inscrire des engagements dans une charte enseignants-étudiants-encadrants sur les lieux de stage, annexée à la convention de stage.


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François Braun se donne un an pour refonder le métier d’infirmier. Ambitieux, le projet interministériel suscite néanmoins la méfiance des syndicats et des organisations professionnelles. Explications.

Le compte à rebours est lancé. Dans un discours prononcé fin mai, François Braun dévoilait les grandes lignes de la réforme des soins infirmiers. Réclamée de longue date par la profession, cette transformation reposera sur trois piliers : la formation, les compétences et les carrières. Une approche plus agile par grandes missions sera notamment privilégiée pour mieux tenir compte de la technicité, de la diversité et de la complexité des activités réalisées. Les cursus de formation seront également repensés pour les adapter aux besoins locaux, attirer toujours plus de jeunes et renforcer leur accompagnement jusqu’au diplôme. Autre enjeu prioritaire : les collectifs de travail au sein desquels les infirmiers exerceront des compétences élargies, en équipe, seront rénovés et renforcés, et leurs expertises reconnues dans une perspective de progression et d’évolution professionnelle.

Des mesures concrètes

La réforme passera par deux changements critiques : la refonte du référentiel de formation et la révision du décret sur les actes infirmiers, qui n’a pas été modifié depuis dix-neuf ans. Plusieurs mesures concrètes ont déjà été dévoilées par le ministre de la Santé et de la Prévention. Le tutorat durant les stages sera développé, et l’apprentissage renforcé « dès la rentrée prochaine ». Certaines disciplines, comme la pédiatrie, la psychiatrie ou la gérontologie, seront davantage enseignées. Parmi d’autres missions, les infirmiers se verront confier « toute la latitude nécessaire » pour prendre en charge les plaies chroniques. Autre avancée notable : l’intégration « prochaine » des protocoles de coopération nationaux dans le droit commun. « Je pense notamment au protocole concernant l’éducation thérapeutique autour de la prise en charge de l’insuffisance cardiaque, ou encore aux consultations d’addictologie pour les patients en sortie d’hospitalisation », détaillait François Braun, qui souhaite par ailleurs « renforcer, faciliter et faire mieux connaître » la diversité des évolutions en cours de carrière, non sans réitérer sa volonté de pouvoir compter sur 5 000 IPA à l’horizon 2024.

Des réactions prudentes

Les principaux représentants du secteur se disent globalement satisfaits des dernières annonces ministérielles, mais… « Reste à savoir dans quelle proportion les missions se substitueront aux actes. Nous plaiderons pour que ces derniers demeurent l’essence du métier socle », tempérait Daniel Guillerm, président de la Fédération nationale des infirmiers. Une chose est sûre : la profession est prête à relever le défi de l’accès aux soins. « Il n’y a pas de déserts infirmiers. Nous avons la possibilité de prendre en charge davantage de patients et davantage d’actes, y compris dans les lieux les moins bien pourvus en médecins. Nos compétences seraient très utiles dans les soins préventifs, curatifs et palliatifs, mais nos missions devront être impérativement élargies », rappelait Patrick Chamboredon, président de l’Ordre national des infirmiers, dans un entretien accordé au journal Le Monde. Selon le calendrier fixé par François Braun, le projet interministériel doit aboutir à la rentrée 2024. Un délai particulièrement court face à l’ampleur du chantier. La problématique est ouvertement posée : attirer et fidéliser les étudiants et les professionnels de la filière en redonnant du sens et de la valeur au métier. Il reste un an au gouvernement pour tenir sa promesse…

 

Formation : les principales mesures annoncées par François Braun

  •  Doubler le nombre d’instituts de formation en soins infirmiers impliqués dans une cordée de la réussite pour la rentrée 2023 ;
  • Renforcer et développer l’apprentissage, notamment en première année de formation « dès l’an prochain » ;
  • Introduire de nouveaux enseignements (pédiatrie, psychiatrie, gérontologie…) et de nouveaux outils d’enseignement (simulation…), et transformer la politique de stage ;
  • Accélérer l’intégration pédagogique des instituts de formation avec l’université ;
  • Renforcer l’accompagnement et le suivi des étudiants, via la publication d’un guide du mentorat « dès la rentrée 2023 » et le lancement d’un plan d’accompagnement au déploiement et à la formation des mentors ;
  • Interdire la pratique de l’intérim en sortie de formation.

 


Photo : Ministère de la Santé

L’été s’annonce chaud et orageux.

Il le sera très certainement au sein des structures hospitalières, et plus particulièrement au sein des services d’urgence. La situation n’est (malheureusement) pas nouvelle, mais le remède se fait toujours attendre.

Comme beaucoup le souhaitent, le recours aux urgences doit être repensé. Doit-on systématiquement les considérer comme un « passage obligé » pour les personnes âgées fragilisées par leur condition ? Des alternatives existent. De nombreux sites proposent des solutions adaptées qui s’inscrivent dans un véritable parcours de vie.

L’accueil de nos futurs diplômés sera tout aussi important. Ne l’oublions pas : la qualité de l’accueil est le premier maillon de la fidélisation. Les attentes des professionnels en exercice sont parfaitement légitimes, mais elles doivent être raisonnées. Le diplôme n’est qu’un passeport. L’expertise vient avec l’expérience.