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Dans une décision rendue mi-juin, le Conseil d’Etat valide définitivement le principe d’un accès direct en deuxième année de soins infirmiers pour les aides-soignants expérimentés.

La plus haute juridiction administrative du pays a donc choisi de rejeter le recours déposé en septembre dernier par six organisations infirmières, dont la FNESI, le CEFIEC, l’ANDPE et le SNPI, qui dénonçaient un texte inadapté aux exigences du métier et en complet décalage avec la montée en compétences des infirmiers, non sans insister sur les pertes de chance encourues par les patients. Selon les modalités initialement prévues par l’arrêté du 3 juillet 2023 et la circulaire ministérielle qui encadrait la mise en œuvre de cette réforme, les aides-soignants justifiant d’au moins trois ans d’expérience à temps plein sur les cinq dernières années et sélectionnés par la voie de la formation professionnelle continue pourront directement intégrer la deuxième année de formation d’infirmier, après avoir suivi un parcours spécifique de formation validé d’une durée de trois mois.


Photo : Philippe Changon / Cocktail Santé

Dix-neuf députés ont récemment déposé une proposition de loi visant à créer un statut indépendant pour les aides-soignants, mais aussi un statut adapté pour les accompagnants éducatifs et sociaux, les aides médico-psychologiques et les auxiliaires de vie.

Composé de quatre articles, le texte prévoit notamment une reconnaissance explicite des compétences des aides-soignants qui pourront « effectuer des soins courants de la vie quotidienne, définis comme des soins liés à un état de santé stabilisé ou à une pathologie chronique stabilisée et qui pourraient être réalisés par la personne elle-même si elle était autonome ou par un aidant ». Il prévoit également la délégation par les infirmiers de certains « actes accomplis et soins dispensés dans un établissement ou un service à domicile à caractère sanitaire, social ou médico-social » dans le cadre de protocoles spécifiques. Ces évolutions législatives et statutaires sont vivement contestées par les syndicats infirmiers qui évoquent une confusion des rôles et un chevauchement des compétences, non sans redouter une concurrence tarifaire et une perte d’activité.


Photo : Frédérik Astier / Cocktail Santé

Entamé, interrompu puis repris, le processus de réingénierie de la formation d’aide-soignant touche à sa fin, six ans après son lancement.

Le projet d’arrêté détaillant les modalités du nouveau référentiel métier a été validé le 20 avril dernier par le Haut Conseil de la santé publique. Il fixe notamment la durée de la formation à douze mois, contre dix actuellement. Il définit également cinq nouveaux blocs de compétences*, contre huit modules de formation auparavant.

Trois missions prioritaires seront prochainement assignées aux aides-soignants : accompagner la personne dans les activités de sa vie quotidienne et sociale ; collaborer au projet de soins personnalisé dans son champ de compétences ; contribuer à la prévention des risques et au raisonnement clinique interprofessionnel.

Désormais imminente, cette réforme doit permettre d’améliorer la prise en charge des personnes âgées, mais aussi de valoriser et de restaurer l’attractivité de la profession. Le texte doit entrer en vigueur à la rentrée prochaine. Les anciens référentiels seront abrogés le 30 juin 2022.

(*) Les cinq nouveaux blocs de compétences de la formation d’aide-soignant : accompagnement et soins de la personne dans les activités de sa vie quotidienne et de sa vie sociale ; évaluation de l’état clinique et mise en œuvre de soins adaptés « en collaboration » ; information et accompagnement des personnes et de leur entourage, des professionnels et des apprenants ; entretien de l’environnement immédiat de la personne et des matériels liés aux activités en tenant compte du lieu et des situations d’intervention ; travail en équipe pluriprofessionnelle et traitement des informations liées aux activités de soins, à la qualité/gestion des risques.

Quelques jours avant de tirer sa révérence, l’ancienne ministre des Solidarités et de la Santé était en visite officielle à l’IFAS* de Nanterre. La nouvelle candidate à la mairie de Paris profitait de l’occasion pour annoncer une série de mesures co-construites avec des aides-soignants, des représentants de la formation, des organisations syndicales et des employeurs.

Compétences, formation, qualité de vie au travail : Agnès Buzyn entend renforcer l’attractivité en berne d’un métier hautement stratégique. Parmi les principales dispositions présentées le 13 février dernier, citons notamment la suppression définitive du concours d’aide-soignant, qui sera remplacé par un système d’examen de dossier et d’entretien oral valorisant davantage les qualités attendues, à commencer par les qualités relationnelles. « Cette mesure s’appliquera dès le mois de septembre, avec un mécanisme transitoire pour ne pas pénaliser celles et ceux qui préparent actuellement le concours », précisait-elle. Autres annonces fortes : l’allongement et le recalibrage de la formation initiale pour mieux coller à la réalité de l’exercice ; la création d’une nouvelle formation collective certifiante, axée sur les besoins des personnes âgées ; la création d’un fonds national de prévention doté de 40 millions d’euros pour améliorer la gestion de la sinistralité.

(*) Institut de formation des aides-soignants – IFAS.

59 mesures pour un montant total de quatre milliards d’euros sur cinq ans. Officiellement présenté le 29 octobre dernier, le rapport El Khomri* contient de nombreuses propositions pour restaurer l’attractivité des métiers du grand âge et de l’autonomie.

Cinq axes forts ont été identifiés : assurer de meilleures conditions d’emploi et de rémunération, en ouvrant de nouveaux postes, en rénovant les conventions collectives et en mettant en place une initiative nationale ; réduire la sinistralité et améliorer la qualité de vie au travail ; moderniser les formations et changer l’image des métiers ; innover pour transformer les organisations ; garantir la mobilisation et la coordination des acteurs et des financements aux niveaux national et territorial.
L’heure est visiblement à l’urgence. Mal préparée, la France n’est pas encore prête pour affronter une crise démographique sans précédent. « Nous sommes confrontés à un immense défi. Il nous faudra répondre au vieillissement de la population, mais aussi à la volonté des Français de rester chez eux le plus longtemps possible », rappelait très justement l’ex-ministre du Travail de François Hollande, aujourd’hui directrice de S2H Consulting (groupe Siaci Saint-Honoré).

92 300 postes à créer

Mieux rémunérer pour mieux recruter : tel sera l’un des principaux enjeux. Augmentation des salaires, remboursement des frais de déplacement, octroi de véhicules de fonction… Myriam El Khomri identifie plusieurs pistes pour améliorer la « santé financière » des soignants, en particulier dans le secteur de l’aide à domicile, via une modification des conventions collectives. Significatif, le coût de la remise à niveau des rémunérations inférieures au Smic est estimé à 850 millions d’euros sur la période 2020-2024.
Pour faire face à la hausse programmée des besoins liés à la prise en charge des personnes en perte d’autonomie, 92 300 postes d’aides-soignants et d’accompagnants éducatif et social seront également créés au cours des cinq prochaines années, soit un investissement total de 2,25 milliards d’euros.
Près de 500 millions d’euros seront par ailleurs consacrés à la création de plates-formes départementales des métiers du grand âge, une sorte de « guichet unique » visant notamment à sécuriser les recrutements à l’échelle locale.

Vers une suppression du concours d’aide-soignant ?

Pour absorber la demande actuelle et future, Myriam El Khomri suggère de doubler le flux de formation annuel, alors que les candidatures ont chuté de 25 % en cinq ans. Elle recommande notamment la suppression du concours d’aide-soignant, qu’elle considère comme « un frein d’accès à la profession », mais aussi la gratuité de la formation, qui pourrait désormais être accessible via ParcourSup. La question du « manque à gagner » pour les instituts spécialisés est ouvertement posée.
Elle préconise par ailleurs de recourir davantage à l’alternance et à la validation des acquis de l’expérience, et propose que les soignants au contact des personnes âgées et dépendantes suivent une formation spécifique en gérontologie.
Qu’il s’agisse des aides-soignants ou des accompagnants éducatif et social, 352 600 professionnels devront être formés d’ici à 2024. Pour mémoire, 60 000 postes sont actuellement vacants. 200 000 autres sont également menacés par les départs en retraite et le turn-over…

Des mesures complémentaires

D’autres chantiers d’envergure seront parallèlement engagés, à commencer par un programme de lutte contre la sinistralité, trois fois supérieure à la moyenne nationale dans ces deux professions. Financée par les excédents de la branche accidents du travail et maladies professionnelles, cette action devra contribuer à réduire la proportion actuelle de 25 %. Un montant de 500 millions est prévu à cet effet, avec un renforcement de la logique préventive.
Pour finir, une campagne de communication sur les métiers du grand âge sera prochainement lancée. Dotée d’un budget de 20 millions d’euros, elle devra changer le regard de la société sur des métiers socialement utiles, mais insuffisamment reconnus.
Selon Agnès Buzyn, les propositions du rapport El Khomri constitue « une feuille de route à la fois courageuse, innovante et opérationnelle ». La plupart d’entre elles pourraient d’ailleurs être reprises dans le projet de loi consacré au grand âge, qui devrait être présenté en décembre prochain.

(*) « Plan de mobilisation générale en faveur des métiers du grand âge pour la période 2020-2024 », Myriam El Khomri (octobre 2019).

NB : Suppression du concours d’aide-soignant dès la rentrée 2020, réingénierie de la formation en blocs de compétences, certification de la formation d’assistant en soins de gérontologie, création d’une formation spécifique liée au grand âge… Partie prenante du groupe de travail constitué par le ministère de la Santé, l’ANdEP a étroitement participé à l’élaboration de ces recommandations. Notons également que l’intégration des candidats à la formation d’aide-soignant dans le dispositif ParcourSup n’est pas encore actée. Elle est même peu probable pour la rentrée prochaine.