Dans une situation politique et budgétaire dégradée, la chute de François Bayrou plonge le pays dans le doute… et interroge ouvertement la poursuite de certaines réformes essentielles, notamment dans le domaine de la santé. Seule certitude : la France compte un cinquième Premier ministre en trois ans.

194 voix pour et 364 voix contre. L’Assemblée nationale a refusé d’accorder sa confiance au projet de redressement des comptes publics proposé par François Bayrou, qui avait engagé la responsabilité de son gouvernement au titre de l’article 49 alinéa 1 de la Constitution. En ouverture d’une séance extraordinaire du Parlement, le 8 septembre dernier, les députés ont très largement voté contre son plan pluriannuel de réduction de la dette publique et de relance de la production économique, entraînant de facto la démission du Premier ministre*. « Vous avez le pouvoir de renverser le gouvernement, mais vous n’avez pas le pouvoir d’effacer le réel. Le réel demeurera inexorable, les dépenses continueront d’augmenter plus encore et le poids de la dette, déjà insupportable, sera de plus en plus lourd et de plus en plus cher », commentera un François Bayrou résigné. Prenant acte de cette décision, Emmanuel Macron a rapidement nommé Sébastien Lecornu, ministre des Armées depuis le début du quinquennat, qui a immédiatement été chargé de consulter les forces politiques pour adopter un budget et de construire des accords pour garantir la stabilité politique et institutionnelle du pays.

Réserves et inquiétudes

Une fois n’est pas coutume : les réactions ont été relativement discrètes. Le monde de la santé redoute des changements superficiels, mais aussi la remise en cause de certaines réformes essentielles. « Cette situation ne doit surtout pas retarder les échéances sociales et budgétaires prévues », rappelle le Sniil, qui fait notamment de la poursuite de la réforme infirmière et des revalorisations tarifaires un double enjeu majeur. De leur côté, les fédérations hospitalières réclament une stabilité institutionnelle et une priorité réelle donnée à la santé, notamment via une présentation rapide du projet de loi de financement de la Sécurité sociale et l’adoption d’une loi de programmation en santé. Priorité des priorités, le montant du prochain Ondam suscite de vives inquiétudes. « Il doit absolument être à la hauteur des besoins de notre système de santé et des attentes de notre profession, prévient le Sniil. Si son taux de progression était insuffisant, le comité d’alerte pourrait être amené à geler les revalorisations tarifaires obtenues dans le cadre des discussions conventionnelles. » Les médecins libéraux en ont récemment fait les frais…

Une suite en pointillé…

Au-delà des grandes orientations budgétaires, la chute du gouvernement Bayrou soulève plusieurs interrogations, notamment en termes de calendrier. Selon les textes organiques, le PLF et le PFSS doivent être déposés avant le mardi 7 octobre. Faute de pouvoir respecter ce délai, une loi spéciale au périmètre restreint pourrait s’imposer… comme l’an dernier. Outre un possible retard, la configuration politique actuelle fragilise la position du nouveau Premier ministre. Dans une Assemblée nationale fragmentée, divisée et polarisée, où les jeux de pouvoir bloquent toutes les velléités de réforme par crainte de représailles sociales ou de censure parlementaire, les solutions ne sont pas légion. Toujours écartée par le président de la République, une nouvelle dissolution ne peut pas être totalement exclue, ses marges de manœuvre étant de plus en plus restreintes. « Il va falloir être sûrement plus créatif, parfois plus technique, et plus sérieux dans la manière de travailler avec nos oppositions. Il faut changer de discours et de méthode sur le fond et sur la forme », disait Sébastien Lecornu, lors de la cérémonie de passation. Seule certitude : la France compte un cinquième Premier ministre en trois ans. Pour combien de temps ?

(*) Suppression de deux jours fériés, doublement du plafond des franchises médicales et des participations forfaitaires, gel des prestations sociales… Le plan Bayrou proposait notamment de réduire la dette publique de 44 milliards d’euros dès 2026.


Photo : Luc Seba / Cocktail Santé

Dans un communiqué publié début septembre, la FNESI dénonce une hausse importante des frais de scolarité pour les étudiants en soins infirmiers.

Blouses, chaussures, matériel médical, livres… La facture atteint 3 034 euros, en moyenne, soit une progression de 8,43 % par rapport à la rentrée 2024. « Malgré une instruction prévoyant la fourniture et l’entretien des tenues professionnelles par les structures d’accueil, certains étudiants doivent encore les acheter eux-mêmes », souligne la Fédération. Autre « injustice financière » pointée du doigt : les ESI paieront 506,07 euros de plus que les autres étudiants du supérieur. Pour limiter les risques d’abandon* et réduire la précarité étudiante, la FNESI réclame des mesures concrètes, comme la gratuité des visites médicales via les services de santé étudiante ou la médecine du travail. Elle préconise deux autres solutions : inscrire explicitement la prise en charge des tenues dans le futur arrêté de formation, et engager un dialogue stratégique avec les établissements et les autorités pour réévaluer les indemnités de stage et réformer le système de bourses.

(*) Selon la FNESI, 70 % des étudiants en soins infirmiers ont envisagé d’arrêter leur formation, dont 16,5 % pour raisons financières.


Photo : Philippe Chagnon / Cocktail Santé

Dans un communiqué publié début septembre, la Fédération nationale des CPTS dresse un état des lieux du déploiement de ces structures de proximité, qui regroupent des professionnels de santé autour de projets territoriaux pour améliorer l’accès aux soins et la coordination des parcours de santé.

Selon les dernières données disponibles, la France comptait 821 CPTS en 2024, dont 691 actives, qui couvraient 84 % du territoire. Structuration des parcours, déploiement des actions de prévention, gestion des crises sanitaires, renforcement du lien ville/hôpital… Elles remplissaient des missions essentielles pour les populations couvertes : 70 % orientaient les patients sans médecin traitant, 72,6 % répondaient aux soins urgents et 65 % participaient au SAS. Elles avaient également des impacts professionnels tangibles : 70 % accueillaient des étudiants, 58 % soutenaient des projets d’installation et 45 % optimisaient le temps de soins. Pour accroître leur utilité médicale et sociale, la FCPTS formule trois recommandations : rénover le cadre conventionnel, clarifier les missions et adapter les financements aux réalités territoriales. Dans un contexte de désertification médicale aggravée, la Fédération recommande un travail concerté avec la CNAM et la DGOS pour renforcer les bonnes pratiques et garantir la pérennité des CPTS.

NB : les Communautés professionnelles territoriales de santé ont été créées par la loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016 dite « loi Touraine ». Elles ont été intégrées dans le champ conventionnel par le biais d’un Accord-cadre interprofessionnel signé en juin 2019.


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Dans une étude statistique publiée début septembre, la Mutualité Française, l’Institut Montaigne et l’Institut Terram apportent un nouvel éclairage sur la santé mentale des jeunes.

Les résultats de ce sondage révèlent une fragilité psychique généralisée chez les 15-29 ans : 83 % souffrent de fatigue persistante, 75 % de troubles du sommeil, 62 % de tristesse et 31 % ont déjà eu des pensées suicidaires. Principal enseignement de cet auto-questionnaire : 25 % seraient atteints de dépression avec des disparités marquées, notamment en Guyane, où ce taux atteint 52 %. Les jeunes femmes et les jeunes en situation de précarité sont les populations les plus touchées. Dispositifs fragmentés, peu lisibles ou difficilement accessibles, cette analyse met également en lumière les limites des réponses publiques.

Améliorer l’accès aux soins psychologiques, renforcer la prévention, agir sur les déterminants sociaux, économiques et territoriaux, lutter contre la stigmatisation, mobiliser les acteurs de proximité et les jeunes eux-mêmes, développer les leviers de bien-être… Plusieurs recommandations sont formulées, en lien avec les attentes exprimées par les sondés, pour résoudre cette crise silencieuse.

NB : ce sondage a été mené en avril dernier auprès de 5 633 jeunes âgés de 15 à 29 ans représentatifs de la population française.

(*) « Santé mentale des jeunes de l’Hexagone aux Outre-mer : cartographie des inégalités », Mutualité Française, Institut Montaigne, Institut Terram / Ipsos (septembre 2025).


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Pour la deuxième année consécutive, la France occupe le onzième rang du dernier classement de Shanghai, qui recense les mille meilleures universités du monde.

Parmi les vingt-sept établissements français sélectionnés, soit deux de plus que l’an dernier, quatre figurent dans le Top 100 et huit dans le Top 200. Tête de gondole hexagonale, l’Université Paris-Saclay se classe treizième au niveau mondial et troisième au niveau européen. Pour le gouvernement, cette progression témoigne de l’excellence scientifique française et de la reconnaissance internationale de ses chercheurs : « Cette performance est le fruit d’une politique de consolidation universitaire menée depuis vingt ans, appuyée par la simplification juridique des regroupements d’établissements et des investissements ciblés via le PIA et France 2030. »

Dans un contexte de plus en plus concurrentiel, les efforts fournis devront toutefois être poursuivis. Selon l’Observatoire des sciences et techniques, la France a glissé du sixième au treizième rang mondial en nombre de publications scientifiques. Malgré leurs limites méthodologiques, ces classements soulignent les défis de l’enseignement supérieur et de la recherche.


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Dans le prolongement de son dernier congrès national qui s’est tenu fin août, l’association Soins aux professionnels de santé veut faire de la santé des soignants la prochaine Grande Cause nationale.

Arguant notamment de la « dégradation alarmante » de leur état physique et mental, cette reconnaissance affirmerait la « volonté politique de protéger les soignants et les étudiants » dans un contexte de violences accrues et de fortes pressions professionnelles qui aggravent leur mal-être. Cette association fixe quatre grandes priorités : lever les tabous, favoriser l’accompagnement, développer l’information et renforcer la prévention. A tout le moins, le sujet reviendra prochainement sur le devant de la scène médiatique.

Lancé il y a dix-huit mois, le comité de suivi ministériel sur la santé des soignants doit présenter un plan d’action thématique avant la fin de cette année. Copiloté par la Direction générale de l’offre de soins et le neurochirurgien Philippe Denormandie, il comportera des mesures concrètes et pérennes qui se veulent « indépendantes des changements politiques ». Les objectifs sont clairement affichés : valoriser les structures existantes, professionnaliser les dispositifs et agir rapidement pour préserver la santé des soignants, essentielle à celle des patients.


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La France a un nouveau Premier ministre. Le cinquième… en trois ans ! Une situation inédite et durable qui ne doit surtout pas compromettre la poursuite des réformes engagées. Alors que les besoins de soins explosent, la formation des infirmiers reste prisonnière d’un cadre obsolète, inadapté aux réalités du terrain et aux ambitions du métier.

Un nouveau référentiel d’activités et de compétences a bien été élaboré, mais cette avancée demeure théorique. Elle doit être complétée par un nouveau référentiel de formation, dont les contours sont encore flous. Son entrée en vigueur étant prévue pour la prochaine rentrée universitaire, la parution de ce texte fondateur devient urgente.

Tant que les blocages institutionnels et règlementaires ne seront pas levés, la réingénierie de la formation infirmière sera en sursis. Pendant ce temps, les jeunes hésitent, les vocations s’étiolent, les départs s’accélèrent… au risque de fragiliser tout le système de santé. Former plus, former mieux, former autrement : tel devrait être le mot d’ordre.

Malgré cette période de flottement, le programme de travail de l’ANdEP est bien rempli. La place des acteurs des instituts dans le partenariat universitaire, la formation des directeurs de soins qui prennent des postes en institut ou encore les partenariats EMS, SNIFMK et SIFEF sont autant de sujets qui mobilisent toute notre attention. Sans oublier nos futures journées d’étude, dont le thème vous sera prochainement dévoilé.

Dans un rapport qui a fait grand bruit, la Cour de comptes décrit une trajectoire « hors de contrôle » des comptes de la Sécurité sociale et envisage une possible « crise de liquidité » à court terme, sauf « mesures vigoureuses de redressement ». Le gouvernement prépare déjà les esprits aux mesures douloureuses.

Est-ce le début de la fin ? Dans un rapport publié fin mai*, la Cour des comptes alerte les pouvoirs publics sur la trajectoire « hors de contrôle » des finances de la Sécurité sociale, et plus particulièrement des dépenses de la branche maladie. Elle évoque notamment un « risque de plus en plus sérieux de crise de liquidité » qui pourrait menacer le versement des prestations aux assurés… dès 2027. Selon les projections effectuées par les sages de la rue Cambon, le déficit des régimes obligatoires de base de la Sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse devrait encore augmenter de 6,8 milliards d’euros et culminer à 22,1 milliards en 2025. Autre motif de préoccupation : la dette sociale pourrait, sans mesures vigoureuses de redressement, atteindre 115 milliards d’euros en 2028. « Ceux qui pensent que les problèmes de liquidité, de solvabilité ou de crédibilité sont des problèmes théoriques se trompent », rappelait Pierre Moscovici, premier président de cette institution chargée de contrôler la régularité des comptes publics.

Trente-quatre recommandations

Au-delà du constat, la Cour propose une solution concrète pour éviter le « défaut de paiement » du système. La taille du marché des capitaux à court terme étant potentiellement insuffisante pour absorber le montant d’emprunt dont l’Acoss aura besoin, les magistrats financiers suggèrent de recharger et de prolonger la durée de vie de la Cades, qui peut emprunter à moyen et long terme dans des conditions plus favorables, au-delà de 2033. Parmi ses trente-quatre recommandations pour alléger le poids du déficit, la Cour des comptes suggère notamment de stopper les « dérives continues » dans l’exécution de l’Ondam. Outre des dispositions infra-annuelles permettant de réguler les dépenses en évitant les répercussions sur le résultat des hôpitaux publics, elle préconise, dans le cadre du PLFSS 2026, de « préparer un programme pluriannuel de mesures de maîtrise sur la progression des dépenses de l‘Ondam, en développant la prévention en santé, en réorganisant l‘offre de soins des établissements de santé et des établissements et services médico-sociaux, et en recherchant un partage des efforts entre les acteurs du système de santé ».

Le temps des décisions

Dans son minutage et ses attendus, ce rapport au vitriol met la pression sur le pouvoir exécutif, dont la gestion comptable est implicitement pointée du doigt. Prise entre plusieurs feux, la France affiche le déficit public le plus élevé de la zone euro et traverse une crise politique majeure qui annihile toute velléité de réforme par crainte de représailles sociales ou de censure parlementaire. Dans un contexte géopolitique particulièrement instable, qui fragmente les échanges commerciaux et fragilise la croissance économique, la situation budgétaire française pourrait rapidement se dégrader si le pays perdait la confiance des marchés, ce qui entraînerait mécaniquement une hausse de la prime de risque. Même sans accident majeur, notre charge d’intérêts dépassera 100 milliards d’euros d’ici à la fin de la décennie. Dos au mur, le gouvernement multiplie les sorties médiatiques pour préparer les esprits aux mesures douloureuses. Certaines réformes controversées, comme la réduction du périmètre des ALD ou la création d’une TVA sociale, sont déjà envisagées pour équilibrer les dépenses et les recettes. Seule certitude : les décideurs politiques devront trouver entre 40 et 50 milliards d’euros pour assainir les finances publiques.

(*) « La Sécurité sociale : rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale », Cour des comptes (mai 2025).


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La loi Pradal a été définitivement adoptée, fin juin, par le Parlement.

Volet pénal du plan national pour la sécurité des professionnels de santé présenté en septembre 2023, le texte sanctionne plus lourdement les agressions perpétrées contre tous les professionnels travaillant dans un lieu de soins, quel que soit le statut ou la fonction exercée par la victime ; les prestataires de santé à domicile, comme les infirmiers ou les kinésithérapeutes, sont également concernés.

Les peines seront majorées pour les violences les plus graves et celles ayant entraîné une interruption totale de travail. Les sanctions pénales contre les auteurs de violences sexuelles commises sur un soignant dans le cadre professionnel et, dans une moindre mesure, le vol de matériel médical ou paramédical ou le vol commis dans un établissement de santé ou au préjudice d’un professionnel de santé sont renforcées. Autre avancée majeure : la loi Pradal élargit et durcit le délit d’outrage. La sanction infligée sera plus importante quand il survient à l’intérieur d’un établissement ou d’une structure de santé ou au domicile du patient.

Considéré comme un facteur de renoncement, le dépôt de plainte sera également facilité pour encourager les signalements qui pourront, sous certaines conditions, être effectués par un tiers.


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