Les syndicats professionnels et l’assurance maladie négocient actuellement une nouvelle convention médicale. Dans un périmètre budgétaire restreint, comprimé par une inflation importante, les parties signataires devront innover pour relever le défi de l’accès aux soins. Au regard des ambitions et des attentes affichées, la discussion pourrait rapidement virer à l’affrontement.

Le marathon a commencé début novembre, et devrait durer plusieurs mois. Les six organisations syndicales représentatives des médecins libéraux* et l’assurance maladie négocient actuellement une nouvelle convention médicale. Assorti de droits et de devoirs, ce contrat liera les deux parties pour une durée de cinq ans. Quatre objectifs prioritaires ont été fixés par la pouvoirs publics : améliorer l’accès aux soins de tous et lutter contre les déserts médicaux ; renforcer la qualité des soins et soutenir l’action des médecins libéraux en matière de santé publique ; garantir un médecin traitant à chacun, en libérant du temps médical ; poursuivre le développement du numérique en santé. Dans un contexte marqué par la chronicité, le vieillissement et la pénurie, la discussion doit permettre de trouver un équilibre entre les engagements et les moyens. « C’est un rendez-vous important pour les assurés sociaux et leurs conditions d’accès aux soins. C’est un rendez-vous important pour les médecins libéraux, leurs conditions d’exercice et leur rémunération », résume Thomas Fatôme, directeur général de la Cnam, qui se dit prêt à investir pour restaurer l’attractivité de la profession. Dans le calendrier établi, les partenaires conventionnels devront trouver un terrain d’entente avant le 28 février 2023. Faute d’accord, un règlement arbitral sera imposé par la puissance publique…

Faux départ !

Dans un périmètre budgétaire restreint, comprimé par une inflation galopante, la voie sera particulièrement étroite. Parmi d’autres sujets brûlants, comme les règles d’installation ou les délégations de tâches avec les autres professions de santé, la refonte de la nomenclature et la revalorisation des actes seront des enjeux centraux. Premier signal défavorable : les syndicats médicaux ont quitté la table des négociations dès la séance inaugurale, refusant d’attendre le mois de janvier pour aborder les questions tarifaires, jugées prioritaires pour accueillir davantage de patients. Au regard des ambitions et des attentes affichées, la discussion pourrait rapidement tourner à l’affrontement, à l’image de la fronde menée par les biologistes. Représentatifs ou non, plusieurs syndicats professionnels ont lancé un préavis de grève pour les deux premiers jours du mois de décembre, appelant tous les médecins libéraux du pays à fermer leur cabinet pendant quarante-huit heures. A des degrés divers et selon des modalités différentes, ils revendiquent une augmentation significative du montant de la consultation médicale. Certains exigent un alignement sur la moyenne européenne, soit cinquante euros. D’autres réclament plusieurs niveaux de tarification, compris entre trente et cent-cinquante euros, en fonction de la complexité, de la durée et de la fréquence des cas traités, voire de l’expertise requise.

(*) Avenir Spé-Le Bloc, CSMF, FMF, MG France, SML et UFML-S.


Photo : Philippe Chagnon / Cocktail Santé

Dix mois après son lancement, les pouvoirs publics ont livré un premier bilan encourageant du déploiement de « Mon espace santé ».

Traitements, allergies, vaccinations, résultats d’examens… Ce carnet de santé numérique permet à son bénéficiaire de stocker, renseigner, classer, consulter et partager ses données de santé avec les soignants et les établissements de son choix. Parmi d’autres objectifs, cette interface sécurisée doit améliorer la qualité, la sécurité et la coordination des soins.

Selon les chiffres communiqués début novembre, 65,4 millions de comptes ont été créés, soit un taux de refus inférieur à 2 %. Certificats médicaux, résultats de biologie, dossiers d’hospitalisation… 7,2 millions de documents ont été téléversés par des patients, et plus de 25 millions par des professionnels de santé.

A cette occasion, le ministre de la Santé et de la Prévention a dévoilé les douze premières solutions référencées dans le catalogue de services numériques. Accessibles à tous les usagers, elles répondent à des exigences juridiques, techniques, éthiques et sécuritaires. A noter : trois nouvelles applications ont été labellisées depuis cette annonce officielle.


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20 % des étudiants en soins infirmiers ne vont pas au bout de leur cursus.

Problématique dans un contexte de pénurie généralisé, le constat émane de François Braun en personne, qui se dit « préoccupé » par cette situation. Selon le ministre de la Santé et de la Prévention, deux grandes raisons expliquent ce phénomène : la précarité financière, renforcée par le versement tardif des bourses par les régions, et la « maltraitance » subie durant les stages de formation, notamment en première année. Il évoque des expériences souvent douloureuses dans des services de gériatrie ou des Ehpad. « Ce type de stage à forte pression devrait être reporté en fin d’études. Les apprentis infirmiers devraient commencer par des stages dans services des plus complexes et très pointus, comme les urgences ou la réanimation », estime-t-il.

Fervent défenseur de la suppression du concours d’entrée en IFSI, François Braun s’est montré très clair : « C’est au cadre de la formation de s’adapter à ces nouveaux profils, et non l’inverse ! » Loin de concerner la seule filière infirmière, cette vague d’abandons touche également les étudiants en médecine, mais dans une proportion deux fois inférieure.


Photo : Freepik

Dans un Livre Blanc publié fin octobre, l’Association française des sociétés de recherche sous contrat propose de développer des études cliniques décentralisées.

Dans ce modèle hybride, encore peu répandu en France, seule une partie des essais serait menée au domicile du patient, avec l’intervention d’infirmières ou de kinésithérapeutes libéraux dans la majorité des cas. Ces derniers seraient notamment chargés de recueillir des données, de réaliser des tests de dépistage et de relever des mesures (signes vitaux, électrocardiogramme, poids…).

Ils pourraient également prodiguer des soins, administrer un traitement et suivre l’observance, ou encore organiser les prélèvements et les transports. Selon l’AFCROs, cette pratique présente un intérêt accru pour les patients fragiles ou ne pouvant pas se déplacer.

Moins contraignante et plus attractive, elle pourrait augmenter le niveau de participation, diminuer le temps de recrutement et améliorer la qualité des données recueillies. Trois freins régulièrement observés dans la conduite des études cliniques.


Photo : Stephen Caillet / Cocktail Sante

Les sénateurs ont validé une proposition de loi visant à renforcer la formation des sages-femmes.

Adoptée en première lecture par les députés, il y a un an, le texte prévoit trois évolutions majeures, à commencer par l’universitarisation des études de maïeutique, qui doit définitivement consolider le statut médical de la profession. Il prévoit également la mise en place d’un troisième cycle d’études qui débouchera sur un diplôme d’Etat de docteur en maïeutique. Autre avancée en perspective : la création d’un statut de « bi-appartenant » qui permettra de concilier activité clinique et recherche, et facilitera le recrutement d’enseignant-chercheur en maïeutique.

Une évolution notable qui doit notamment pallier le manque d’attractivité des carrières universitaires. Adoptée à l’unanimité par le Sénat, qui s’est contenté d’apporter des modifications mineures portant essentiellement sur le calendrier du déploiement des dispositifs, cette proposition de loi sera prochainement examinée en seconde lecture par l’Assemblée nationale.


Photo : Philippe Chagnon / Cocktail Santé

 

Dans un contexte de pénurie médicale, le CH de Compiègne-Noyon va déployer un service mobile d’urgence et de réanimation paramédicalisé courant novembre.

Formée aux protocoles d’intervention, cette équipe paramédicale sera composée d’un infirmier et d’un ambulancier, et sera supervisée par un médecin régulateur du Samu 60. Dictée par le manque, cette décision est vivement contestée par un groupe d’élus locaux, qui réclame la présence d’un médecin sur le terrain.

Début novembre, leur pétition avait rassemblé plus de 1 200 signatures. Soutenu par la mairie de Noyon et la CME, le centre hospitalier intercommunal défend son projet : « Sans Smur paramédicalisé, il n’y a pas de Smur du tout ! »  Selon la direction, cette initiative ne dégradera pas l’offre de soins et permettra une réorganisation du service des urgences qui comptabilise 18 000 passages par an.


Photo : Philippe Chagnon / Cocktail Sante

La transformation du système de santé est en marche.

Voulu par Emmanuel Macron, le CNR Santé doit y contribuer directement. Dans un contexte marqué par le vieillissement, la chronicité et la pénurie médicale, plusieurs propositions émergent pour améliorer durablement l’accès aux soins des Français. Un chiffre inquiétant résume la nature des enjeux : 600 000 patients en affection de longue durée n’ont pas de médecins traitants. Qu’en sera-t-il demain ?

En pleine réflexion, François Braun compte notamment sur les infirmières en pratique avancée pour pallier le manque de praticiens, en particulier dans les zones sous-dotées. Trois expérimentations seront prochainement lancées pour évaluer la faisabilité d’un accès direct aux IPA… dans le cadre d’une structure d’exercice coordonné. Les médecins doivent comprendre le rôle et l’utilité de cette fonction essentielle qui contribuera à libérer du temps médical.

Autre évolution notable, la santé numérique fait irruption dans le quotidien des professions paramédicales. Deux événements récents sont à signaler : la parution de l’arrêté relatif à la formation socle au numérique pour les étudiants en santé et la troisième vague de l’appel à manifestation d’intérêt sur « les compétences et les métiers d’avenir ». Prévue par le plan France 2030, cette avancée majeure permettra aux instituts de financer ces enseignements.

Piloté par Christine Ammirati, le comité de suivi du processus d’universitarisation des formations en santé s’est réuni début novembre. Enjeux conventionnels, diplomation et ingénierie, encadrement et recherche, droit des étudiants… Quatre grands sujets seront traités dans les prochains mois. Une chose est sûre : la formation universitaire des IBODE nécessitera un véritable travail de réflexion entre les acteurs pour réussir cette entrée dans l’enseignement supérieur.