Après les pathologies chroniques stabilisées et les polypathologies courantes en soins primaires, l’oncologie et l’hémato-oncologie ou encore la maladie rénale chronique, la dialyse, la transplantation rénale, les infirmières de pratique avancée disposent d’un quatrième domaine d’intervention : la psychiatrie et la santé mentale. Retour sur les contours d’un nouveau métier.

Une longue attente a pris fin, au cœur de l’été. Publiés le 13 août dernier, deux décrets et trois arrêtés marquent la création d’un nouveau domaine de compétences pour les infirmières de pratique avancée, désormais habilitées à intervenir officiellement dans le secteur de la psychiatrie et de la santé mentale. Cursus universitaire, actes et examens autorisés, modalités d’enregistrement auprès des instances représentatives : les textes balisent le terrain de la réforme, partie intégrante du plan « Ma Santé 2022 ».

Quelques précisions attendues figurent notamment au menu. Selon les vœux du législateur, le protocole d’organisation devra impérativement être établi « entre un ou plusieurs psychiatres et un ou plusieurs infirmiers exerçant en pratique avancée », éliminant de fait les autres spécialités médicales. L’exécution des prescriptions d’une IPA par une infirmière, un technicien de laboratoire de biologie médicale, un pharmacien d’officine ou un service de soins infirmiers à domicile sera également possible, au même titre que la prise en charge par l’assurance maladie d’une prescription de produits de santé réalisée par une IPA.

Une formation ajustée

Parmi les principales avancées en matière de formation, un infirmier préparant le diplôme d’IPA peut dorénavant participer à certaines activités (conduire un entretien, effectuer une anamnèse, prescrire certains produits), à condition toutefois d’être en présence d’une IPA ou, à défaut, d’un médecin. Selon les termes d’un arrêté, les IDE* du secteur psychiatrique pourront aussi « prétendre à la formation conduisant au diplôme d’Etat d’infirmier en pratique avancée, exclusivement en vue d’obtenir la mention psychiatrie et santé mentale ».

A noter : le diplôme d’Etat des IPA vaut le grade de master. Il est réservé à des infirmiers diplômés. Au terme d’une formation de deux ans, il leur permet d’exercer dans l’un des domaines d’intervention correspondant aux mentions du diplôme. Autre précision utile : les professionnels intéressés par la psychiatrie et la santé mentale pourront débuter leur formation dès la rentrée 2019.

Des missions concrètes

Sur le terrain, le périmètre d’activité de ces IPA seront multiples. Ils seront impliqués dans l’observation, le recueil et l’interprétation des données, dans le cadre du suivi d’un patient. Ils seront notamment autorisés à effectuer des synthèses cliniques et à « monitorer » l’observance des traitements. Ils pourront également renouveler des prescriptions ou procéder à des adaptations posologiques, en particulier pour les thymorégulateurs, les psychostimulants, les antipsychotiques atypiques, les neuroleptiques conventionnels et les antiépileptiques.

Ils pourront encore pratiquer des « techniques de médiation à visée thérapeutique et de réhabilitation psychosociale » ou « prescrire des examens de biologie médicale ». Ils pourront enfin « concevoir et mettre en œuvre des actions visant le développement, le maintien de l’autonomie de la personne et la limitation de ses incapacités, de même que des programmes d’éducation thérapeutique ».

Quid de la rémunération ?

Les textes déterminent par ailleurs leurs modalités d’enregistrement auprès du conseil départemental ou interdépartemental de l’ordre des infirmiers. Les informations à déclarer seront fixées par le Conseil national de l’ordre des infirmiers. La déclaration devra être saisie sur un portail de téléservice sécurisé, mis à disposition par l’instance ordinale.

Dans ce programme très détaillé, une inconnue demeure malgré tout, celle de la rémunération future des IPA. Les pratiques avancées font actuellement l’objet d’une âpre négociation conventionnelle entre l’assurance maladie et les représentants de la profession. Les dernières indiscrétions font état de divergences notables entre les trois syndicats d’infirmiers. L’échéance approche, mais aucun accord n’est assuré à ce stade…

Pour rappel, le statut d’infirmière de pratique avancée avait été créé par la loi Touraine du 26 décembre 2016. La démarche devait à la fois permettre de répondre à la pénurie de médecins et d’offrir des perspectives de carrières aux IDE. Les premiers textes sur leur champ d’intervention avaient été publiés en juillet 2018. Le domaine de la psychiatrie et de la santé mentale avait été inclus dans le projet initial, mais il avait finalement été retiré, à la dernière minute.

(*) Infirmière diplômée d’Etat – IDE.