Les carrières paramédicales au sein de l’hôpital public font-elles encore rêver ?

Difficiles, les conditions d’exercice y sont aussi de plus en plus précaires. Comment attirer et fidéliser des professionnels ? Comment susciter des vocations chez les étudiants ? Un nouveau (énième ?) plan d’urgence pourra-t-il réellement faire la différence ?

66 euros par mois ! Le geste du gouvernement mérite d’être salué, mais permettra-t-il vraiment d’améliorer le sort des 40 000 agents hospitaliers qui devraient en bénéficier ? Réservée à la région parisienne, cette mesure n’aurait-elle pas pu ou dû profiter à tous les infirmiers et à tous les aides-soignants du pays, de manière symbolique ?

En tant que formateurs, nous détenons une partie de ces réponses.

Nous avons un rôle essentiel à jouer pour inverser la tendance, en étant davantage force de propositions auprès des pouvoirs publics. Nous devons également mieux motiver, mieux préparer et mieux accompagner nos étudiants.

Sans nier la réalité, il nous appartient de valoriser des métiers aussi utiles qu’indispensables à la population.

Peut-être même plus que jamais… Dans les propositions de réforme, le rapport humain est trop souvent négligé. C’est pourtant l’une des valeurs fondamentales du soignant, celle d’apporter le meilleur service possible à ses patients, tant pour sa santé que pour son bien-être.

C’est le cœur de notre mission. C’est le sens de notre action !

Emmanuel Marcon avait promis des « mesures fortes ». Dos au mur, le gouvernement a donc présenté un nouveau plan d’urgence pour l’hôpital public, le 20 novembre dernier.

Pour apaiser la grogne hospitalière, 1,5 milliard d’euros seront débloqués sur trois ans, selon l’échéancier suivant : 300 millions en 2020, 500 millions en 2021 et 700 millions en 2022. Cette hausse du budget alloué aux établissements de santé se traduira par une réévaluation de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie au cours des trois prochaines années. L’an prochain, l’Ondam hospitalier atteindra finalement 2,4 %, soit une hausse de 0,3 point par rapport aux prévisions initiales. Les hôpitaux percevront également 150 millions d’euros par an pour acheter du matériel. Cet investissement « à la main des équipes » sera intégralement financé par le ministère de la Santé.

Autre annonce forte, l’Etat reprendra un tiers de la dette de l’hôpital public d’ici à 2022, soit 3,3 milliards d’euros par an. D’après Edouard Philippe, cette manœuvre doit permettre de moderniser et d’améliorer le fonctionnement des établissements de santé, sans pour autant creuser le déficit de la nation.

Des mesures spécifiques pour les paramédicaux

En toile de fond, 980 millions d’euros seront consacrés à restaurer l’attractivité des carrières médicales et paramédicales, notamment sous la forme de revalorisations ciblées. A titre exceptionnel, la région parisienne fera d’ailleurs l’objet d’un traitement de faveur particulier pour mieux tenir compte du coût de la vie. Le gouvernement prévoit effectivement d’accorder une prime de 800 euros par an aux aides-soignants et aux infirmiers qui gagnent moins de 1 950 euros par mois. 40 000 agents hospitaliers devraient ainsi en bénéficier. Dès l’an prochain, une prime de 100 euros sera également attribuée aux aides-soignants travaillant auprès de personnes âgées.

Selon Agnès Buzyn, les hôpitaux publics auront par ailleurs des moyens financiers spécifiques pour « valoriser l’engagement et l’investissement des personnels », en fonction de critères de qualité des soins et de prise en charge établis par chaque service. 600 000 personnes pourraient profiter d’une prime annuelle moyenne de 300 euros.

Dix instituts paramédicaux proposent désormais une formation spécifique pour devenir assistant de régulation médicale.

Ouvert aux personnes âgées d’au moins 18 ans, titulaires du baccalauréat ou justifiant de trois années d’expérience professionnelle à temps plein*, cet enseignement débouchera sur l’obtention d’un diplôme reconnu, valable pour une durée de cinq ans.

A Orléans, la première session débutera le 6 janvier prochain, en lien avec le Samu 45. Elle s’étalera sur 42 semaines, réparties à part égale entre la théorie et la pratique, sous la forme de stages. Elle accueillera 20 étudiants. Deuxième étape du processus : une nouvelle formation sera lancée en septembre prochain, vraisemblablement dans les mêmes conditions.

Encadrée par un arrêté et deux décrets, cette réforme fait suite au décès tragique de Naomi Musenga, une jeune strasbourgeoise de vingt-deux ans dont l’appel au secours n’avait pas été pris au sérieux par ses interlocuteurs, en décembre 2017. Pour rappel, l’assistant de régulation médicale est le premier maillon de la chaîne d’urgence. Il assure la réception des appels du Samu Centre 15. Il contribue également au traitement des demandes et au suivi des interventions, sur avis médical.

(*) Les assistants de régulation médicale déjà en poste seront tenus de valider tout ou partie de cette formation, selon leur niveau d’expérience, d’ici au 31 décembre 2026.

Dans un livre blanc*, l’Ordre national des infirmiers formule 26 propositions pour améliorer la qualité des pratiques et l’accès aux soins, mais aussi pour lutter contre le manque de reconnaissance et l’épuisement professionnel.

Matériel médical, plaies aiguës, actes biologiques, antalgiques, renouvellement et adaptation des traitements pour les patients souffrant de pathologies chroniques : l’instance préconise notamment un élargissement du droit de prescription. Elle plaide également en faveur d’un renforcement des prérogatives de l’infirmier dans l’éducation sanitaire et la prévention, en particulier dans le domaine de la vaccination.

Soumise à l’approbation de la profession, certaines propositions ont été massivement plébiscitées, à commencer par l’octroi du statut de professionnel de santé dans le Code de la santé publique (96 %). La création d’une consultation infirmière dédiée aux patients chroniques (94 %), l’instauration d’une consultation d’évaluation et de coordination du parcours de soins dans le cadre du maintien à domicile (92 %) ou encore la prescription du matériel nécessaire à l’autonomie (92 %) et des actes de soins pour traiter les plaies aiguës (90 %) figurent en tête des attentes.

Selon l’Ordre, la plupart de ces évolutions réclameront toutefois « une actualisation des textes en vigueur ». Pour rappel, ces propositions sont issues de la « grande consultation infirmière ». Un peu plus de 20 000 contributions auront été recueillies, via une grande enquête en ligne, menée entre le 27 février et le 28 septembre derniers. Pour compléter cette démarche, 15 forums régionaux avaient été organisés en métropole et dans les départements d’outre-mer.

(*) « Reconnaître la contribution infirmière au système de santé », Conseil national de l’Ordre des infirmiers (octobre 2019)

La HAS vient d’actualiser ses recommandations sur le traitement de la bronchiolite du nourrisson, une affection qui touche 480 000 enfants de moins de deux ans chaque hiver.

Depuis le 14 novembre dernier, la kinésithérapie respiratoire n’est plus recommandée de manière systématique pour les bébés de moins de douze mois, faute d’efficacité. Les techniques traditionnelles du clapping et de la vibration sont même rigoureusement contre-indiquées, le risque d’effets secondaires étant largement supérieur au bénéfice obtenu. Cette « sentence » a provoqué un véritable tollé chez les professionnels du secteur. Ils estiment que la prise en charge de la bronchiolite aiguë dans les cabinets de kinésithérapie va bien au-delà du simple drainage bronchique. Ils contestent également l’argumentaire scientifique de la HAS, regrettant notamment le manque d’études documentées en ambulatoire*. Ils s’inquiètent par ailleurs d’une potentielle saturation des cabinets médicaux et des services d’urgence pour des cas, habituellement traités en premier recours.

(*) Parmi les douze études passées en revue par la HAS, deux d’entre elles ont été réalisées en milieu libéral.

L’assurance maladie et les deux syndicats d’infirmiers libéraux se sont entendus sur les conditions de la rétribution des pratiques avancées en ville, le 4 novembre dernier. Cet avenant conventionnel prévoit différents niveaux de rémunérations forfaitaires, qui valorisent la prise en charge assurée par les IPA, mais aussi les missions transversales de coordination et de recherche associées.

Destiné à vérifier l’éligibilité du patient, un entretien préalable (20 €) sera complété par quatre forfaits trimestriels (58,90 € pour le premier, puis 32,70 € pour les trois autres). Le montant total des interventions réalisées pourra donc atteindre 177 euros par an et par assuré suivi. A noter : une majoration spécifique (3,90 €) pourra être appliquée pour les enfants de moins de sept ans et les personnes âgées de plus de quatre-vingt ans, soit 20 % de la patientèle anticipée. Issu du forfait annuel d’aide à la modernisation, l’indicateur d’exercice coordonné sera porté à 400 euros pour les infirmiers de pratique avancée, contre 100 euros pour les infirmiers libéraux. Il atteindra même 1 120 euros pour les IPA conventionnés exerçant en zone de sous-densité médicale.

Les partenaires conventionnels se sont par ailleurs accordés sur l’octroi d’une aide financière au démarrage de l’activité exclusive de pratique avancée, quelle que soit la zone d’installation. Versée sur deux ans, cette prime de 27 000 euros sera néanmoins soumise à conditions. Les bénéficiaires devront suivre un nombre minimal de patients (50 la première année et 150 la deuxième année). Ce soutien financier sera également suspendu au-delà de 300 patients, stade à partir duquel la viabilité économique de l’activité est considérée comme acquise. Inscrite dans la loi Touraine de 2016 et réaffirmée dans le plan « Ma santé 2022 », la création du métier d’infirmier de pratique avancée doit permettre d’améliorer le suivi des patients chroniques, d’optimiser le temps médical et de renforcer l’accès aux soins. Selon l’assurance maladie, 5,6 millions de personnes sont potentiellement concernées par cet accompagnement spécifique.